Les dernières prévisions économiques de la BCE publiées jeudi pourraient être essentielles pour tracer la voie à suivre
Les dernières prévisions économiques de la BCE publiées jeudi pourraient être essentielles pour tracer la voie à suivre AFP

La Banque centrale européenne a de nouveau gelé les coûts d'emprunt jeudi et a averti que la lutte contre l'inflation n'était pas terminée, éteignant ainsi les espoirs des investisseurs d'une baisse anticipée des taux l'année prochaine.

Comme prévu, la BCE a profité de sa dernière réunion de l'année pour maintenir les taux d'intérêt inchangés pour la deuxième fois consécutive.

Cette pause a laissé le taux de dépôt de référence à un niveau record de 4 %, après une série historique de hausses visant à maîtriser la flambée des prix.

Les taux d'intérêt étaient à des niveaux qui, s'ils étaient "maintenus pendant une durée suffisamment longue", apporteraient une "contribution substantielle" au retour de l'inflation vers l'objectif de 2%, a déclaré l'institution de Francfort.

L'inflation de la zone euro a ralenti plus rapidement que prévu en novembre pour atteindre son plus bas niveau depuis deux ans à 2,4 pour cent, après avoir culminé à environ 10 pour cent l'année dernière.

Mais la présidente de la BCE, Christine Lagarde, a mis en garde contre une déclaration de victoire trop précoce.

"Même si l'inflation a baissé ces derniers mois, elle devrait rebondir temporairement à court terme", a déclaré Lagarde, alors que les mesures de soutien introduites par de nombreux gouvernements l'année dernière en réponse à la flambée des prix de l'énergie ont été progressivement supprimées.

La hausse des salaires et les éventuelles retombées du conflit au Moyen-Orient pourraient également présenter des risques à la hausse pour l'inflation, a-t-elle ajouté.

"Nous ne devons absolument pas baisser la garde", a déclaré Lagarde aux journalistes.

"Entre la randonnée et la coupe, il y a tout un plateau... de prise", a-t-elle ajouté.

Cet avertissement intervient après que la récente baisse de l'inflation et l'assombrissement de la situation économique ont amené les investisseurs à parier que la BCE commencerait à réduire ses taux plus tôt que prévu en 2024.

Alors que de nombreux analystes s'attendaient initialement à ce que la BCE commence à baisser ses taux en juin, certains s'attendent désormais à une première réduction dès mars ou avril.

Mais Lagarde a déclaré que les gouverneurs n'avaient pas "discuté du tout de réductions de taux".

Cette réaction contrastait fortement avec le message de la Réserve fédérale américaine publié mercredi selon lequel elle prévoyait de procéder à trois réductions de taux l'année prochaine.

Cette orientation conciliante tant attendue a déclenché un large rallye des marchés et alimenté l'optimisme quant au fait que d'autres banques centrales emboîtent le pas.

La Banque d'Angleterre a toutefois fait écho à la prudence de la BCE jeudi.

Elle a laissé son taux directeur inchangé, à 5,25 pour cent, et a averti que le taux resterait élevé " pendant une période prolongée " pour lutter contre une inflation tenace.

Lagarde a réitéré que les prochaines mesures de la BCE seraient " dépendantes des données ".

La BCE serait "particulièrement attentive" aux statistiques à venir sur les salaires et les bénéfices des entreprises, a-t-elle précisé, avec des données "riches" attendues pour le premier semestre 2024.

"La réunion d'aujourd'hui de la BCE a confirmé notre scénario de base d'un changement progressif vers une attitude totalement accommodante avec des baisses de taux à partir de juin", a déclaré Carsten Brzeski, économiste chez ING.

La BCE a également dévoilé ses dernières prévisions, qui incluent pour la première fois l'année 2026.

L'inflation de la zone euro devrait désormais ralentir à 2,7 % en 2024, au lieu des 3,2 % précédemment projetés.

En 2025, il diminuera encore à 2,1 pour cent, avant de descendre sous la barre des 2 pour cent en 2026.

La banque a également revu à la baisse ses prévisions de croissance, l'impact de la hausse des coûts d'emprunt ayant des conséquences néfastes sur les ménages et les entreprises.

La croissance devrait s'établir à 0,6 pour cent cette année, en baisse par rapport à la prévision précédente de 0,7 pour cent, a indiqué la banque. Pour 2024, ce chiffre était de 0,8 pour cent, contre 1,0 pour cent.

La BCE a également annoncé jeudi qu'elle accélérerait la réduction de son bilan, appuyant ainsi sur un autre levier dans la lutte contre l'inflation.

La banque commencera à éliminer progressivement les réinvestissements d'obligations arrivant à échéance de son programme d'achat d'obligations d'urgence en cas de pandémie (PEPP) au cours du second semestre 2024 et mettra fin complètement aux réinvestissements d'ici la fin de l'année.

Lors d'une journée exceptionnelle pour les banques centrales d'Europe, la Banque nationale suisse a annoncé qu'elle maintenait son taux d'intérêt directeur à 1,75 pour cent.

La Norges Bank de Norvège a, quant à elle, résisté à la tendance à la pause en augmentant son principal taux d'intérêt d'un quart de point de pourcentage, à 4,5 pour cent. Cela indique cependant que cette hausse est probablement la dernière du cycle actuel.