La France "vue mer" vs la France du vide, démographie
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La pandémie de Covid-19 a-t-elle réellement entraîné une fuite des grandes métropoles et une revanche des villes moyennes, des campagnes et des littoraux ?

Selon une étude comparative des données communales de 2017 et 2021 de l'Insee, menée pour le Fondation Jean-Jaurès par Jérôme Fourquet de l'Ifop et le géographe Sylvain Manternach, la pandémie de Covid-19 et les confinements n'ont pas entraîné une fuite massive des grandes métropoles, mais ont plutôt amplifié certaines tendances déjà en cours dans les choix résidentiels des Français.

Les zones touristiques, les littoraux et les couronnes périurbaines de certaines grandes villes sont les principaux bénéficiaires de ces mouvements démographiques, tandis que l'espace central et les grands confins franciliens subissent une déprise démographique.

Les résultats de l'étude montrent des zones en croissance démographique assez marquées, telles que les littoraux atlantique et méditerranéen, les couronnes périurbaines de certaines grandes villes et la bande frontalière le long de la Suisse.

Ces zones forment un "nouveau croissant fertile" allant de Saint-Malo jusqu'au littoral aquitain et basque, passant par Rennes, Nantes, La Rochelle, Bordeaux, Toulouse et Montpellier, puis remontant la vallée du Rhône et rejoignant Pontarlier et Le Russey en longeant la frontière suisse.

Accueillant historiquement un important contingent de retraités aisés et de professions libérales, ces villes avec " vue sur mer " ont vu affluer dans le sillage de la pandémie des cadres télétravailleurs ayant les mêmes goûts et les mêmes aspirations résidentielles que ces deux autres groupes sociaux.

Mais les retraités aisés, les professions libérales et les cadres télétravailleurs ne sont pas les seuls publics à être attirés par le littoral atlantique et les zones situées dans le " croissant fertile ". Ces territoires sont également très prisés et massivement demandés par les enseignants. Dans l'Éducation nationale, les mutations dépendent du nombre de points dont disposent les enseignants. Et le nombre de points nécessaires pour obtenir un poste dans les départements constituant le " croissant fertile " est incomparablement plus élevé que celui observé dans les départements du quart nord-est ou du centre de la France.

La France "vue mer" et la France du vide

En contraste, un vaste espace central dans lequel la population a diminué, parfois assez significativement, apparaît sur la carte.

Si, en son centre, l'aire parisienne affiche toujours un certain dynamisme démographique (que l'on observe également autour de quelques agglomérations de cette zone centrale comme Orléans par exemple), tout ce vaste espace central à dominante rurale et peu valorisé touristiquement ne parvient pas à enrayer la chute de sa population.

Une France du "vide démographique" se dessine donc, en partant des Vosges pour aller jusqu'aux campagnes mayennaises et de l'Artois jusqu'à la Creuse. Elle ne parvient pas à enrayer la chute de sa population, subissant la forte attraction de la gigantesque métropole francilienne sans bénéficier réciproquement d'un afflux significatif de Franciliens.

Ces mouvements démographiques s'inscrivent dans la continuité des tendances déjà à l'œuvre précédemment, la pandémie de Covid-19 n'ayant fait qu'amplifier certaines dynamiques en cours. Les activités du secteur tertiaire donnent désormais le ton et impriment leur marque sur le territoire, tandis que les activités productives pèsent de moins en moins.