Napoléon 1er, l'empereur du business ?
"Bonaparte franchissant le Grand-Saint-Bernard", la peinture de Jacques-Louis David exposée au palais du Belvédère, à Vienne. Matis Demazeau

Napoléon est partout ! Plus de deux siècles après sa mort et alors que son histoire est actuellement narrée dans les salles obscures, l'empereur français suscite toujours autant de passion dans le monde entier. Et ce, malgré son image largement décriée par une grande partie de la population. Dans les souvenirs contemporains, il reste, pour certains, celui qui a permis la modernisation de la France au sortir de la Révolution - à l'image de l'écriture du Code Civil en 1804 - et celui qui a apporté la grandeur au pays. Pour d'autres, il est l'autocrate qui a notamment rétabli l'esclavage et mené des guerres sanguinaires à travers toute l'Europe.

Quoi qu'il en soit, la figure de l'empereur reste véritablement... lucrative ! Un business particulièrement juteux s'est emparé de son image, à commencer par les nombreux objets historiques dont les ventes aux enchères peuvent parfois atteindre des sommes frôlant l'indécence.

En 2007, un sabre porté par l'empereur à la bataille de Marengo (1800) a été adjugé à 4,8 millions d'euros. Dix ans plus tard, une feuille d'or de la célèbre couronne de sacre de Napoléon s'est vendue à 625 000 euros. De même, 7 700 euros ont été dépensés pour... une mèche de cheveux de Bonaparte ! Selon les auteurs du livre Who's Bigger (l'informaticien Steven Skiena et de l'ingénieur Google Charles Ward), il est la deuxième personnalité la plus influente sur internet (derrière... Jésus), comptabilisant près de 50 000 objets actuellement mis en vente sur eBay à son effigie.

Un chapeau vendu à près de 2 millions d'euros

Le 19 novembre dernier, le célèbre bicorne noir doté d'une cocarde bleu blanc rouge de Napoléon 1er, s'est envolé pour près de deux million d'euros lors d'enchères organisées par la maison de ventes Osenat, à Fontainebleau.

Un chapeau de Napoléon vendu à 2 millions d'euros
Dimitar Dilkoff / AFP

La valeur de l'objet était estimée entre 600 000 et 800 000 euros. Des collectionneurs du monde entier étaient spécialement venus pour s'arracher un bout de d'histoire de France : "Durant cette vente, tous les records ont été battus, avec des clients venus de Finlande, du Guatemala... J'espère que Ridley Scott aura le même succès avec son film que nous aujourd'hui !", s'enthousiasmait le commissaire-priseur Jean-Pierre Osenat auprès du Parisien.

En effet, ce succès économique ne se cantonne pas aux ventes aux enchères. La fiction est un autre levier permettant un certain enrichissement "sur le dos de l'empereur". En 2002, Yves Simoneau avait réalisé une mini-série de quatre épisodes dans laquelle Napoléon 1er était incarné par le membre de la troupe du Splendid Christian Clavier. Diffusée sur France 2, la fiction avait attiré, chaque soir, entre 6,7 millions et 9 millions de téléspectateurs.

Aujourd'hui, c'est l'acteur oscarisé Joaquin Phoenix qui interprète le "Petit Caporal" dans le film Napoléon de Ridley Scott. En une semaine, il a attiré 764 419 curieux dans les salles de cinéma de l'Hexagone. Dans le monde, 78,8 millions de dollars ont (déjà) été générés. Toutefois, le budget colossal de production du long-métrage - estimé à près de 200 millions de dollars - relativise ce succès.

80 000 ouvrages lui seraient consacrés

Napoléon fascine aussi le monde de l'art et de la littérature. Selon l'historien Jean Tulard, qui a signé une cinquantaine d'ouvrages sur l'empereur, 80 000 livres au total lui sont consacrés. De même, il est le chef d'Etat post-révolutionnaire le plus portraituré au monde, à l'image des peintures de Jacques-Louis David Le Sacre de Napoléon et Bonaparte franchissant le Grand-Saint-Bernard.

Le mystère et les controverses qui gravitent toujours autour de sa personne expliquent notamment cet engouement : "Napoléon étant complexe, il ne peut que susciter des images contrastées. Vous avez donc aujourd'hui comme hier ceux qui le détestent, ceux qui l'adulent, et entre les deux des historiens universitaires soucieux d'objectivité qui peinent souvent à se faire entendre face aux historiens grand public", explique l'historienne française Natalie Petiteau à l'AFP.

Tombeau de Napoléon exposé dans le Dôme des Invalides
Le Tombeau de Napoléon exposé dans le Dôme des Invalides, à Paris Matis Demazeau

L'histoire du natif d'Ajaccio permet, parallèlement, de renflouer les caisses de nombreux musées français. Par exemple, sa demeure natale est le musée le plus visité de Corse avec près d'un millier d'entrées par jour en période estivale. L'Hôtel des Invalides et son musée de l'Armée - qui abritent notamment le tombeau de Napoléon - attirent plus d'un million de visiteurs chaque année.