"Le gouvernement ne pourra pas gouverner le pays tant que cette réforme ne sera pas abrogée", a déclaré la responsable syndicale CGT Sophie Binet (extrême gauche).
"Le gouvernement ne pourra pas gouverner le pays tant que cette réforme ne sera pas abrogée", a déclaré la responsable syndicale CGT Sophie Binet (extrême gauche). AFP

Les manifestants français ont lancé jeudi une nouvelle journée de protestations et de grèves pour dénoncer la réforme des retraites du président Emmanuel Macron, après que les derniers pourparlers entre le gouvernement et les syndicats se sont soldés par une impasse.

Macron, actuellement en visite en Chine, est confronté au plus grand défi de son deuxième mandat concernant sa refonte phare des retraites, qui comprend le relèvement de l'âge de la retraite de 62 à 64 ans et l'exigence que les gens travaillent plus longtemps pour une retraite à taux plein.

Des manifestations ont commencé à travers le pays, avec des grévistes brandissant des drapeaux syndicaux à l'aéroport Charles de Gaulle près de la capitale, ont montré des images télévisées.

Les manifestants de la ville de Vannes, dans l'ouest, ont commencé la journée en dansant une conga et en écoutant la musique d'une fanfare, tandis que des foules se sont également rassemblées dans la ville de Nantes, dans l'ouest, et dans le port sud de Marseille.

Il y a eu des signes que le mouvement de protestation de deux mois et demi commence à perdre de son élan, et les syndicats espèrent une participation massive le 11e jour d'action depuis janvier.

Toutes les parties à l'impasse attendent un verdict du 14 avril sur la validité de la réforme par le Conseil constitutionnel français, qui a le pouvoir d'annuler tout ou partie de la législation.

Alors que les membres du Conseil constitutionnel - dits les "sages" - rendront leur verdict dans le respect d'une stricte interprétation de la loi, les syndicats veulent montrer que le mouvement de contestation a encore de l'élan quelle que soit la décision .

"Nous demandons toujours l'abrogation de la réforme", a déclaré jeudi matin Laurent Berger, responsable du syndicat centriste CFDT, à la radio RTL.

"Nous sommes au milieu d'une crise sociale, une crise démocratique", a-t-il déclaré.

"C'est un problème... qui doit être résolu par le président."

Les protestations ont dégénéré en troubles violents après que la Première ministre Elisabeth Borne a invoqué le 16 mars un pouvoir exécutif controversé pour faire passer le projet de loi au Parlement sans vote.

La police s'attend à ce que 600 000 à 800 000 personnes manifestent dans tout le pays jeudi.

Les syndicats ont déclaré qu'une réunion avec Borne mercredi n'avait fait aucun progrès après qu'elle ait refusé de discuter du retour à l'âge minimum de la retraite de 64 ans.

"C'est clairement un échec alors que le Premier ministre ne permet même pas d'entrer dans cette discussion", a déclaré Cyril Chabanier, au nom des huit principaux syndicats du pays, après à peine une heure de pourparlers.

Il s'agissait du premier rassemblement de ce type entre les deux parties depuis que le gouvernement a présenté le projet de loi controversé sur les retraites en janvier.

Bien qu'elle ait refusé de bouger sur la question, Borne a déclaré qu'elle n'avancerait sur aucun autre sujet lié au travail "sans partenaires sociaux".

Berger a déjà déclaré mercredi que la France traversait "une grave crise démocratique".

Macron doit rester pour le reste de la semaine en Chine, où un assistant a nié l'allégation car le changement de retraite figurait dans le manifeste du président lors de sa campagne de réélection l'année dernière.

"Vous ne pouvez pas parler de crise démocratique lorsque le projet de loi a été promulgué, expliqué au public et que le gouvernement en assume la responsabilité", a déclaré l'assistant, demandant à ne pas être identifié par son nom.

Les chefs syndicaux ont appelé à une participation record aux manifestations jeudi.

Mais les chiffres de la précédente série de grèves et de manifestations de mardi dernier étaient en baisse par rapport à la semaine précédente.

Un nombre record de personnes, plus de 1,2 million, ont défilé contre la réforme dans tout le pays le 7 mars.

Le métro parisien est pour la première fois un jour de grève censé fonctionner avec un minimum de perturbations, selon l'opérateur RATP.

Dans tout le pays, trois trains à grande vitesse sur quatre circuleront, a indiqué l'opérateur ferroviaire SNCF.

Seuls 20% des enseignants devraient faire grève jeudi, a déclaré le syndicat Snuipp-FSU.

L'analyste politique Dominique Andolfatto a déclaré que l'action de jeudi serait un "moment intermédiaire" avant que le Conseil constitutionnel ne rende son verdict le 14 avril.

"Tout ne dépend pas d'aujourd'hui, mais les syndicats ne peuvent pas non plus gâcher cette journée", a-t-il déclaré à France Info.

"S'il y a moins de participation, le gouvernement pensera que sa patience a payé".

Le gouvernement a fait valoir que les changements sont nécessaires pour empêcher le système de retraite de sombrer dans le déficit.

Dans le reste de l'Europe, la plupart des gens prennent leur retraite à la fin de la soixantaine, car l'espérance de vie a augmenté.

Les critiques disent que la réforme des retraites est injuste pour les personnes occupant des emplois difficiles qui commencent à travailler tôt, ainsi que pour les femmes qui interrompent leur carrière pour élever des enfants.

Si le Conseil constitutionnel donne son feu vert, Macron pourra signer les modifications législatives.

Mais l'impasse a érodé sa popularité, un sondage suggérant mercredi que la dirigeante d'extrême droite Marine Le Pen le battrait si l'élection présidentielle de l'année dernière se répétait maintenant.

L'enquête du groupe Elabe pour la télévision BFM a indiqué que Le Pen obtiendrait 55% et Macron 45% s'ils s'affrontaient lors d'un second tour.

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