La loi européenne sur la liberté des médias a été proposée par Bruxelles l'année dernière face aux pressions croissantes auxquelles sont confrontés les journalistes dans des pays comme la Hongrie et la Pologne.
La loi européenne sur la liberté des médias a été proposée par Bruxelles l'année dernière face aux pressions croissantes auxquelles sont confrontés les journalistes dans des pays comme la Hongrie et la Pologne. AFP

Les législateurs européens ont soutenu mardi les propositions visant à renforcer l'indépendance journalistique, mais n'ont pas insisté en faveur d'une interdiction générale de l'espionnage des journalistes par les gouvernements.

La loi européenne sur la liberté des médias a été proposée par Bruxelles l'année dernière face à la pression croissante à laquelle sont confrontés les journalistes dans des pays comme la Hongrie et la Pologne.

La législation vise à protéger les journalistes de toute ingérence politique, en leur permettant de garder leurs sources secrètes et en garantissant le pluralisme des médias dans tout le bloc.

Le vote des députés détermine la position du Parlement sur le projet de loi avant les négociations avec les 27 États membres de l'UE.

Parmi les questions les plus controversées figurent les exemptions prévues pour l'utilisation de logiciels espions contre les journalistes.

Les militants des médias ont critiqué les États de l'UE, la France en tête, pour avoir poussé à élargir les failles permettant aux autorités d'espionner les journalistes au nom de la " sécurité nationale ".

La position du Parlement limite l'utilisation des logiciels espions comme "dernier recours" lorsque les journalistes sont impliqués dans des crimes graves tels que le terrorisme ou la traite des êtres humains, et stipule qu'un juge doit donner son autorisation.

Cela reste loin d'être à la hauteur de l'appel lancé par 80 groupes de défense des droits des médias à voter pour une interdiction totale de l'utilisation de logiciels espions contre la presse.

Mais l'eurodéputée roumaine Ramona Strugariu, l'une des parlementaires en charge du dossier, a insisté sur le fait que cela signifiait que les gouvernements étaient " effectivement interdits " d'utiliser des logiciels espions pour enquêter sur le travail des journalistes.

L'organisme de surveillance des médias Reporters sans frontières a soutenu les clarifications des législateurs et a appelé les pays de l'UE à suivre leur exemple.

La question a été mise sous les projecteurs par la fureur en France suite à la détention de deux jours le mois dernier de la journaliste d'investigation Ariane Lavrilleux pour avoir couvert des fuites de documents affirmant que les services de renseignements français avaient été utilisés pour cibler des civils en Égypte.

Des groupes de journalistes ont dénoncé une atteinte à la liberté de la presse après la perquisition du domicile de Lavrilleux et son arrestation pour interrogatoire par des agents du renseignement intérieur français.

Lavrilleux a qualifié la législation européenne de " l'une des pires lois attentatoires à la liberté " de l'histoire du Parlement.

Un autre élément crucial – et controversé – du projet de loi concerne la modération et la suppression éventuelle des contenus journalistiques par les plateformes en ligne.

Pour éviter de confier trop de pouvoir aux géants de l'Internet, la loi envisage de fixer des conditions plus strictes pour supprimer ou restreindre les reportages des médias.

Pour satisfaire à cette barre, les journalistes doivent répondre à des critères tels que la transparence quant à leur propriété et l'indépendance éditoriale.

Si un point de vente vérifié est considéré comme enfreignant les règles d'utilisation d'une plateforme, il disposera de 24 heures pour se défendre avant de pouvoir faire quoi que ce soit.

L'eurodéputé français Geoffroy Didier a déclaré que cela "consoliderait la liberté d'expression" en empêchant des sociétés comme X, anciennement Twitter, de supprimer les comptes des journalistes.

Mais le grand lobby technologique, l'Association de l'industrie de l'informatique et des communications, s'est plaint que cela " introduit à tort une faille dont des acteurs malhonnêtes peuvent abuser pour se faire passer pour des médias et diffuser de fausses nouvelles ".