Intelligence artificielle
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"Le pire des scénarios suggère que l'IA de Google pourrait à, elle seule, consommer 29,3 TWh par an (contre 1,83 TWh aujourd'hui) soit autant d'électricité qu'un pays comme l'Irlande". Avec l'avènement d'outils comme ChatGPT, l'intelligence artificielle est, sans aucun doute, la grande tendance de cette année 2023. Mais dans un contexte actuel où les enjeux environnementaux inquiètent de plus en plus, une question mérite d'être posée : quelle est l'empreinte énergétique de cette révolution technologique ?

Alex de Vries, doctorant à la VU Amsterdam School of Business and Economics et fondateur de Digiconomist, a étudié l'impact environnemental des technologies émergentes et a publié ses résultats, le 10 octobre dernier, dans la revue Joule. Dans cette étude, l'économiste affirme que l'intelligence artificielle est de plus en plus énergivore.

ChatGPT consomme 10 fois plus d'énergie que Google

À l'instar d'une simple action effectuée sur un moteur de recherche, les interactions avec l'IA générative présentent un certain coût énergétique. Comme le dévoile l'étude, ces dernières peuvent être jusqu'à dix fois plus consommatrices d'énergie. En prenant l'exemple de ChatGPT, l'agent conversationnel développé par OpenAI, une seule requête nécessiterait une consommation de 2,9 wattheures d'énergie. En prenant en compte le nombre de requêtes engagées quotidiennement en début d'année, l'étude estime que ChatGPT pourrait consommer jusqu'à 564 mégawattheures par jour. Pour donner un point de référence, cette quantité d'énergie correspond à la consommation annuelle moyenne d'une cinquantaine de foyers américains.

Consommation d'énergie IA
Consommation d'énergie estimée par requête pour divers systèmes alimentés par l'IA par rapport à une recherche Google standard Joule

Toutefois, bien que l'empreinte énergétique de l'IA continue de s'aggraver, Alex de Vries explique qu'il est important de "tempérer les attentes trop optimistes et trop pessimistes" en ce qui concerne l'intelligence artificielle. En effet, le scénario selon lequel "l'IA de Google pourrait à, elle seule, consommer autant d'électricité qu'un pays comme l'Irlande" reste peu probable.

Celui-ci peut uniquement se réaliser si l'intelligence artificielle est adoptée à grande échelle et intégrée totalement à des outils actuels aussi importants que le moteur de recherche Google. Et, à en croire l'analyse de l'économiste, cela ne serait pas pour tout de suite. "Même si l'adoption rapide de la technologie de l'IA pourrait potentiellement augmenter considérablement la consommation d'énergie d'entreprises telles que Google, divers facteurs liés aux ressources sont susceptibles d'empêcher que de tels scénarios pessimistes ne se matérialisent", écrit-il.

Des outils à utiliser à bon escient

Selon lui, l'intégration totale de l'IA aux services de Google ne serait pas profitable financièrement à l'entreprise américaine et c'est la raison pour laquelle le scénario précédemment présenté ne devrait pas se concrétiser. De plus, de nouvelles innovations modifiant les algorithmes de l'IA pourraient contribuer à atténuer la hausse de sa consommation d'électricité sur le long terme. Parallèlement, il est "probablement trop optimiste" de s'attendre à ce que les potentielles améliorations de l'efficacité matérielle et logicielle de l'IA devraient entièrement compenser toute évolution à long terme de sa consommation électrique.

Dans ce contexte et pour limiter son empreinte énergétique, l'IA doit être exploitée à bon escient. "Les entreprises veulent mettre de l'IA partout parce que c'est 'cool', mais on n'a pas besoin que tout soit 'smart' et 'connecté'. Je préfèrerais une IA qui permettrait d'améliorer les diagnostics de cancer, plutôt qu'une IA générative qui me permette de parler à mon frigo ou mon moteur de recherche", regrette Sasha Luccioni, chercheuse en intelligence artificielle éthique et durable chez HuggingFace.

De même, il est primordiale de sensibiliser les utilisateurs de l'IA sur ce facteur de consommation : "Dans n'importe quel autre secteur, quand on crée un produit qui va avoir des impacts, on doit donner des informations sur son taux d'efficacité, sa consommation énergétique... Quand on comprendra à quel point ces modèles sont énergivores, ça aidera à conscientiser les gens", prévient-elle.