Le sentiment anti-français est élevé dans certaines des anciennes colonies françaises, y compris au Burkina Faso
Le sentiment anti-français est élevé dans certaines des anciennes colonies françaises, y compris au Burkina Faso AFP

Le président Emmanuel Macron entame mercredi une tournée en Afrique centrale dans le cadre d'une campagne diplomatique visant à tester une nouvelle "relation responsable" avec le continent alors que le sentiment anti-français est élevé dans certaines anciennes colonies.

Il fera d'abord escale au Gabon pour un sommet sur l'environnement, avant de se rendre en Angola puis en République du Congo - aussi appelée Congo-Brazzaville - et enfin en République démocratique du Congo voisine.

Le voyage de Macron intervient alors que l'inquiétude grandit à Paris face à l'influence croissante de la Russie dans les pays africains francophones, aux côtés des manœuvres chinoises pour la position, qui sont visibles depuis quelques années.

Au Gabon, il participera au One Forest Summit sur la préservation des forêts dans le monde, y compris le long du vaste bassin du fleuve Congo.

Couvrant 1,62 million de kilomètres carrés (plus de 625 000 millions de miles carrés), les forêts d'Afrique centrale représentent le deuxième plus grand puits de carbone de la planète après l'Amazonie.

Ils abritent également une énorme biodiversité, notamment des éléphants de forêt et des gorilles, et portent des traces de la colonisation de l'humanité primitive.

Mais ils sont confrontés à des menaces telles que le braconnage, la déforestation pour les industries du palmier à huile et du caoutchouc, ainsi que l'exploitation forestière et minière illégale.

Macron dans un discours sur la politique africaine de la France a appelé lundi à une "relation mutuelle et responsable" avec le continent de plus de 50 pays, y compris sur les questions climatiques.

Il a réitéré l'engagement de rompre avec les anciennes politiques postcoloniales.

"Mesurer notre influence à travers un certain nombre d'opérations militaires, s'appuyer sur des liens privilégiés exclusifs avec certains dirigeants, ou considérer que certains marchés économiques nous appartiennent de droit parce que nous étions là avant, ce sont des choses du passé", a-t-il déclaré.

Mais le militant écologiste gabonais Marc Ona Essangui a déclaré à l'AFP qu'il craignait que la visite de Macron ne porte atteinte à l'objectif principal de préservation de l'environnement du sommet sur la forêt tropicale.

Les Gabonais considéreraient plutôt sa présence comme un élan politique pour le président Ali Bongo Ondimba à l'approche des élections présidentielles de cette année, a-t-il déclaré.

"Ce que les gens enregistrent, c'est qu'Emmanuel Macron vient soutenir son candidat", a-t-il déclaré.

Bongo, 64 ans, est président depuis qu'il a succédé à son père en 2009.

Macron a insisté sur le fait que l'Afrique était une priorité de son second mandat et, en juillet, il s'est rendu au Cameroun, au Bénin et en Guinée-Bissau.

Après le Gabon, il se dirige vers l'ancienne colonie portugaise d'Angola dans le cadre d'une campagne visant à renforcer les liens français avec les régions anglophones et lusophones de l'Afrique.

En escale au Congo-Brazzaville, une autre ancienne colonie française, il terminera son voyage dans la République démocratique du Congo voisine - gouvernée par la Belgique à l'époque coloniale - vendredi et samedi.

La tournée de Macron fait suite à des perturbations dans la région du Sahel plus au nord.

Paris s'est brouillé avec de nouvelles autorités militaires dans les anciennes colonies du Mali et du Burkina Faso et a retiré ses troupes des deux pays après des années à les aider à combattre les djihadistes.

La France et ses alliés occidentaux accusent le groupe de mercenaires russes Wagner, tristement célèbre pour ses activités en Syrie et en Ukraine, d'être actif au Mali et en République centrafricaine, également autrefois gouvernés par la France.

Paris a également accusé la Russie de diffuser de la désinformation pour saper les intérêts français sur le continent.

Macron a déclaré lundi que l'armée réduirait son empreinte sur le continent dans les mois à venir, transformant les avant-postes français là-bas en académies de formation ou en bases "partenaires" avec davantage de forces africaines.

Plus de 3 000 militaires français sont déployés au Sénégal, en Côte d'Ivoire, au Gabon et à Djibouti, selon les chiffres officiels. 3 000 autres se trouvent au Sahel, notamment au Niger et au Tchad.

Mais une source militaire française a déclaré que l'armée française hésitait à fermer ses bases dans la région, notamment pour empêcher Wagner de gagner plus d'influence.

L'analyste Elie Tenenbaum, du groupe de réflexion français sur les relations internationales IFRI, a déclaré que la mise en œuvre des plans de Macron serait compliquée.

"Il y a un décalage entre la vision d'un président qui veut renverser la situation et l'état-major qui veut garder les choses telles qu'elles sont", a-t-il déclaré à l'AFP.

Le président français Emmanuel Macron et le dirigeant gabonais Ali Bongo Ondimba à Paris en novembre 2021
Le président français Emmanuel Macron et le dirigeant gabonais Ali Bongo Ondimba à Paris en novembre 2021 AFP
Les forêts d'Afrique centrale abritent une énorme biodiversité, notamment des éléphants et des gorilles
Les forêts d'Afrique centrale abritent une énorme biodiversité, notamment des éléphants et des gorilles AFP