"Il est temps de faire grève": un jeu de mots graffiti dans la ville de Marseille, dans le sud de la France, appelle les gens à manifester
"Il est temps de faire grève": un jeu de mots graffiti dans la ville de Marseille, dans le sud de la France, appelle les gens à manifester AFP

Les livraisons de carburant et les transports publics ont été gravement perturbés en France mardi alors que les syndicats ont lancé une nouvelle journée de protestations contre une réforme des retraites qui repousserait l'âge de la retraite pour des millions de personnes.

Les syndicats ont juré de mettre le pays au point mort avec des grèves contre les changements proposés, qui incluent le relèvement de l'âge minimum de la retraite de 62 à 64 ans et l'augmentation du nombre d'années pendant lesquelles les gens doivent cotiser pour une pension complète.

"Le gouvernement doit prendre en compte (la résistance) quand il y a tant de monde dans la rue, quand il a tant de mal à expliquer et à faire passer sa réforme", a déclaré le chef du syndicat CFDT, Laurent Berger, lors d'une manifestation dans le centre de Paris.

Le président Emmanuel Macron a placé le régime des retraites au centre de sa campagne de réélection l'année dernière, et son cabinet affirme que les changements sont essentiels pour éviter que le système ne tombe en déficit dans les années à venir.

Mais ils font face à une réaction féroce du Parlement et de la rue, près de deux personnes sur trois à travers le pays soutenant les manifestations contre cela, selon un sondage du groupe d'enquête Elabe publié lundi.

Ali Touré, un ouvrier du bâtiment de 28 ans, attendait mardi matin un train retardé au nord de Paris, mais a déclaré que ce n'était "pas grave" s'il arrivait en retard au travail pendant un mois.

"Ils ont raison d'être en grève. Le travail manuel est dur", a-t-il déclaré.

L'ancien candidat présidentiel de gauche Jean-Luc Mélenchon était à une manifestation dans la ville portuaire méditerranéenne de Marseille.

"D'un côté il y a la volonté (de Macron), de l'autre la volonté du peuple", a-t-il dit.

"Qui devrait avoir le dernier mot ? Bien sûr, ce devrait être le peuple", a-t-il ajouté, appelant à de nouvelles élections ou à un référendum sur la réforme.

Le syndicat dur CGT a déclaré que les livraisons de carburant des raffineries à travers la France avaient été bloquées à partir de mardi matin, ce qui pourrait voir les stations-service manquer si les manifestations se poursuivent.

Les syndicats ont mis en garde contre des grèves continues dans les transports publics qui pourraient paralyser certaines parties du pays pendant des semaines.

La police s'attend à ce que 1,1 million à 1,4 million de personnes descendent dans la rue au total, a déclaré à l'AFP une source sous couvert d'anonymat.

La limite supérieure de cette fourchette signifierait une opposition plus forte que lors des cinq jours précédents de rassemblements qui ont eu lieu depuis la mi-janvier.

Du côté des syndicats, Frédéric Souillot, dirigeant du syndicat d'extrême gauche Force ouvrière, a déclaré à la radio RTL qu'il s'attendait à ce que plus de deux millions de personnes manifestent.

La plus grande journée de manifestations à ce jour a fait descendre 1,27 million de personnes dans la rue le 31 janvier, selon les chiffres officiels.

Seul un train régional et à grande vitesse sur cinq circulait.

A la mi-journée, environ 39% des salariés de la SNCF avaient débrayé, a indiqué une source syndicale à l'AFP, un record depuis la première grève de cette année contre la réforme des retraites le 19 janvier.

Pendant ce temps, le ministère de l'Education a estimé le chiffre parmi les enseignants à environ 33%, bien en deçà des 60 revendiqués par les syndicats.

Les représentants des travailleurs doivent se réunir mardi soir pour décider de leurs prochaines actions.

Le gouvernement a fait valoir que les changements sont cruciaux pour empêcher le système de retraite français de tomber dans un déficit profond dans les années à venir.

"Si nous voulons maintenir ce système, nous devons travailler plus longtemps", a déclaré Macron le mois dernier.

Mais les syndicats contestent cette conclusion et affirment que de petites augmentations des cotisations pourraient la maintenir solvable.

Ils soutiennent également que les mesures proposées sont injustes et affecteraient de manière disproportionnée les travailleurs peu qualifiés qui commencent leur carrière tôt, ainsi que les femmes.

Selon l'enquête Elabe, 56% des personnes interrogées ont déclaré qu'elles soutenaient les grèves continues et 59% ont soutenu l'appel à l'arrêt du pays.

Le projet de loi est actuellement débattu à la chambre haute du parlement, après deux semaines de discussions animées à la chambre basse qui se sont terminées sans même parvenir à un vote sur le relèvement de l'âge de la retraite.

Le gouvernement centriste espère faire passer la réforme au parlement avec l'aide de la droite, sans recourir à un mécanisme controversé qui contournerait un vote parlementaire mais risquerait d'alimenter davantage de protestations.

"Nous ne pouvons pas manquer un seul vote" lorsque le projet de loi reviendra à la chambre basse, a déclaré mardi la chef du Parlement de Macron, Aurore Berge, aux législateurs, espérant apaiser les réserves de plusieurs personnalités du parti au pouvoir.

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