le chômage de seniors
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Cela s'appelle jeter un pavé dans la mare ! Notre ministre de l'économie Bruno Lemaire s'est déclaré favorable à un abaissement de la durée durant laquelle l'allocation chômage est versée aux seniors de plus de 55 ans.

En clair, un alignement des règles d'indemnisation sur celles des autres chômeurs, à savoir dix-huit mois pour tous – contre actuellement une durée de vingt-deux mois et demi entre 53 et 55 ans, et vingt-sept mois à partir de 55 ans.

Sur le fonds du sujet, son argument principal est assez juste. Cette durée différenciée avec une indemnisation aujourd'hui plus longue pour les seniors, serait " une hypocrisie totale, une façon de les mettre à la retraite de manière anticipée ", a-t-il assuré.

Si le sujet provoque l'ire des syndicats, c'est que l'emploi des seniors est un problème de fond.

La France est en retard en matière d'emploi des seniors : elle reste toujours à plus de 5 points en dessous de la moyenne européenne, selon une étude publiée par la Dares qui montre que seuls 57% des 55 à 64 ans disposent d'un emploi, contre 62,4 % en moyenne au niveau européen.

Non seulement le chômage est élevé, mais les dernières années de vie professionnelle sont souvent compliquées à vivre parce que dans les deux cas, on note une forte discrimination par l'âge.

Mais quels sont les leviers activables pour changer les choses en profondeur ?

Une étude "Les Seniors et l'Emploi en 2023", réalisée auprès d'un large panel de seniors (plus de 1 500 répondants de plus de 50 ans) et de tous les membres de seniorsavotreservice.com ou du panel de l'Institut Français des seniors, apportent quelques éléments de réponses.

D'abord, les seniors sont les salariés les plus engagés. 75 % des 50-64 ont travaillé plus de 10 ans chez le même employeur et ce pourcentage monte à 90 % chez les plus anciens, signe d'une grande fidélité et d'un engagement fort.

Ils sont d'ailleurs des salariés disciplinés et motivés, qui se rejoignent sur des valeurs telles que le travail bien fait, le respect des consignes, l'esprit de corps et le travail en équipe, le dépassement de soi, l'implication, et la transmission de son savoir-faire.

Concernant leur rapport au chômage, l'étude indique les seniors sont fortement touchés, souvent discriminés, mais résistants.

Chez les 50-64 ans, 7 seniors sur 10 ont connu une période de chômage, le plus souvent de longue durée (2,2 ans en moyenne) et en fin de carrière. Car désormais, passer par la "case" chômeur devient presque la règle avant d'atteindre la retraite. Ainsi, la fin de la vie professionnelle a lieu en réalité à 59 ans.

C'est pour cela qu'ils sont prêts à faire beaucoup d'efforts pour trouver un emploi, changer de métier, se former et 8 sur 10 accepteraient même une baisse de rémunération.

Pourtant, cela ne semble pas suffisant pour changer la donne, car les 3/4 des demandeurs d'emploi de plus de 50 ans indiquent avoir ressenti une discrimination due à leur âge, dont la moitié systématiquement.

Cette situation est d'autant plus dure à vivre que les seniors se sentent seuls face au chômage : 84 % ne sont pas accompagnés dans leur recherche en dehors de Pôle Emploi ou de l'APEC.

Enfin, l'étude met le doigt sur un des éléments clé : la mauvaise préparation de la fin de carrière.

Seulement 3 sur 10 ont bénéficié d'un point de carrière et, parmi ceux qui y ont eu accès, seuls 14 % se sont vus proposer une formation. Les rendez-vous de carrière semblent plus orientés vers la retraite que vers l'organisation de la fin de vie professionnelle.

De même, alors qu'il y a une forte demande d'une transition douce et progressive entre le travail et la retraite, seulement 13 % se sont vu proposer le passage à temps partiel et 1 sur 2 ne savent pas que la retraite progressive existe. 1 sur 2 n'a pas eu droit à un pot de départ.

3/4 des seniors actifs envisagent un Cumul Emploi Retraite. Si seulement 12 % des retraités l'ont fait actuellement, la tendance est à la hausse (+ 65 % en 10 ans, 580 000 cumulaient emploi et retraite en 2021 selon la CNAV).

Pourquoi ce choix de vie ? 84 % pour avoir un complément de revenus, 70 % pour se sentir utile et 68 % l'ont aussi choisi pour rester actif.

En moyenne, un cumul emploi retraite rapporte en plus entre 650 et 1 000 € (Montant moyen de la retraite : 1 532 €) et est pratiqué sur un petit mi-temps pendant deux ans.