Maison Marcel Proust à Illiers combray
Musée Marcel Proust - Maison de Tante Léonie à Illiers-Combray

Sur de nombreux sujets, deux visions s'opposent souvent. La conception pastoraliste idéalise un passé conçu comme une référence absolue. Les choses doivent rester comme " avant ", figées de façon immuable sur une période de référence. Le futur doit être conforme au présent des gens du passé !

Le prométhéen, au contraire, ne croit qu'en l'avenir. Aller " chercher le feu " pour innover, mettre les connaissances et la technique au service de la réinvention permanente des choses et des paysages. Les choses ne sont ni mieux, ni moins bien qu'avant, justes différentes.

Et s'il est un domaine où les pastoralistes et les prométhéens s'opposent régulièrement, c'est bien la gestion de l'urbanisme de nos villes et des paysages de nos campagnes.

Le Conseil d'État vient d'en donner un exemple particulièrement symbolique dans un conflit qui oppose les promoteurs d'un parc éolien et ses opposants. Il s'agit notamment de la préfète d'Eure-et-Loir qui refuse d'autoriser le projet au motif qu'il porterait une atteinte significative à l'intérêt paysager et patrimonial du site remarquable, classé au titre de l'article L 631-1 du Code du patrimoine, du village d'Illiers-Combray.

Lors de sa saisie, la Cour administrative de Versailles avait statué que le classement de ce site, qui a le caractère d'une servitude d'utilité publique, trouve son fondement dans la protection et la conservation de paysages étroitement liés à la vie et à l'œuvre de Marcel Proust, dont un parcours pédestre touristique favorise la découverte. Elle relève également que le clocher de l'église d'Illiers-Combray et le jardin du Pré Catelan, dessiné par l'oncle de Marcel Proust, sont classés au titre des monuments historiques.

En clair, le paysage de la région doit rester identique à celui décrit dans les livres de Marcel Proust !

Inutile de dire que la décision du Conseil d'État était attendue ! Lors du pourvoi en Cassation, ce dernier confirme la vision des juges du fonds et d'appel.

Il estime que par paysage, il faut entendre "une partie de territoire telle que perçue par les populations, dont le caractère résulte de l'action de facteurs naturels ou humains et de leurs interrelations dynamiques. En prenant en considération des éléments ayant trait aux dimensions historiques, mémorielles, culturelles et notamment littéraires du paysage."

Selon le Conseil, le projet litigieux n'était donc pas compatible avec l'exigence de protection des paysages résultant des dispositions de l'article L 511-1 du Code de l'environnement.

Reste à savoir quelles pourront être les références littéraires qui feront autorité en la matière auprès des tribunaux. Quels seront les auteurs dont la vision passée et romantique figera à jamais un territoire.