Taxes carburants France
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Le contexte inflationniste a consolidé le sujet du pouvoir d'achat comme première préoccupation des Français. Une autre mission étatique (et même mondiale...) est pourtant au moins tout aussi cruciale : la protection de l'environnement. Comment l'exécutif espère répondre à ces deux enjeux concomitants ?

La fiscalité sur les carburants a laissé un mauvais souvenir au pouvoir actuel. En 2018, c'est la hausse de la taxe carbone - notamment prévue pour accompagner les Français vers d'autres moyens de déplacements plus verts - qui a représenté la goutte de trop pour les nombreux manifestants appartenant au mouvement des Gilets jaunes. Selon l'économiste du climat Quentin Perrier, le moment pour l'instauration de cette augmentation fiscale était mal choisi : "La hausse de la taxe carbone, prévue de façon programmée et rigide, s'est ajoutée à une hausse conjoncturelle des prix du baril, créant une 'double contrainte' et un sentiment d'impasse pour certains automobilistes", écrit-il dans une note publiée le 9 octobre sur Terra Nova. "Le rejet par les Gilets jaunes de la taxe carbone nous semble en effet questionner une faiblesse importante du dispositif fiscal", poursuit-il.

En effet, selon le spécialiste, le contexte économique doit prendre une place plus importante dans l'élaboration de ce type de projets fiscaux. En l'espèce, l'augmentation des prix internationaux du baril n'a pas incité, à l'époque, l'exécutif à repousser son projet de hausse de la taxe carbone. Et le gouvernement n'a pas l'air d'avoir retenu la leçon : "Ce même système est à nouveau mobilisé dans le Projet de loi de finances de 2024 pour augmenter les taxes sur les carburants dans certains secteurs (BTP, agriculture)", précise la note. Ainsi, l'État se soucie uniquement des enjeux "long-termistes", sans se soucier des variations à court et à moyen terme des prix proposés aux automobilistes.

La "fiscalité élastique" comme solution ?

Quel mécanisme permettrait alors de concilier les enjeux économiques et écologiques ? Comment inciter les consommateurs à changer de comportement sans trop les contraindre ? Quentin Perrier propose de changer de perspective dans la conception fiscale sur les carburants, en tenant compte du prix réel payé par le consommateur. Pour cela, une "taxe élastique" qui diminuerait en cas de forte hausse du prix du baril - sans l'annuler mais en la limitant - et qui augmenterait dans le cas inverse, si les prix des matières premières commençaient à baisser.

"Est-il nécessaire de maintenir un taux élevé de taxe quand les prix du marché s'envolent ? Non, car c'est bien le prix final qui oriente les comportements, et pas le taux de taxe. Et quand les prix s'effondrent, ne faudrait-il pas augmenter ces taux pour maintenir l'incitation à décarboner ?", affirme-t-il. Ainsi, le taux de fiscalité ne serait plus constant mais bel et bien variant. Bien que plus complexe, ce procédé semble être une piste intéressante pour répondre aux problématiques développées dans la note de Terra Nova.

De même, l'économiste du climat prétend que cette nouvelle mesure fiscale serait plus pérenne que les dispositions prises par le gouvernement pour limiter les effets de l'inflation comme la remise de 30 centimes à la pompe ou l'indemnité carburant de 100 euros versée à 4,3 millions de Français.