Président-directeur général de Popeyes France, Olivier Rego, passé chez Sephora et chez Monoprix, s'est vu confier la responsabilité de l'implantation de l'enseigne américaine dans l'Hexagone, dont le premier restaurant a ouvert ses portes en février dernier. Le dirigeant se livre, en exclusivité pour IBTimes France, sur les premiers résultats de Popeyes en France, ainsi que sur ses futurs projets visant à poursuivre le développement de la marque sur le territoire français.

Olivier Rego, PDG de Popeyes France
Popeyes

Pourriez-vous nous présenter l'histoire de la marque américaine Popeyes ?

L'enseigne a été créée en 1972 en Louisiane, aux États-Unis. L'ADN de la marque est une cuisine cajun, épicée, avec beaucoup de goût. Popeyes a suivi un fort développement dans le monde : l'entreprise est, aujourd'hui, la deuxième plus importante du secteur mondial du fast-food de poulet, avec plus de 4 100 restaurants. Son rachat par RBI (Restaurant Brands International) a impulsé une nouvelle dynamique, notamment avec le lancement en 2019 d'un produit phare : le sandwich au poulet. Il a fait un énorme carton outre-Atlantique. Depuis, la stratégie de développement de la marque comprend l'installation de la marque en Europe, en Asie et en Afrique du Sud.

Après une tentative d'implantation ratée en France en 2017, pourquoi Popeyes a décidé de retenter l'expérience ?

Effectivement, la première implantation en France a été très correctement ratée pour rester poli. À l'époque, la carte était très large, avec des produits qui n'avaient pas l'américanité attendue et qui dénaturaient complètement le savoir-faire de Popeyes autour du poulet et des épices. En plus, les prix proposés ne correspondaient pas du tout aux autres prix du marché. Tous ces éléments réduisaient considérablement le potentiel d'expansion de la marque.

Popeyes
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Avant d'accepter le poste, j'étais plutôt inquiet par rapport à cet épisode raté mais je me suis rendu compte que tout avait changé entre temps : RBI a, depuis, structuré un vrai siège en Europe pour accompagner les partenaires et a été beaucoup plus exigeant dans la sélection de ces derniers. De même, l'expérience de la restauration et la solidité financière permettent aujourd'hui de meilleures implantations. Ensuite, le positionnement de la marque en France a vraiment été travaillé contrairement à 2017. Nous avons adapté les produits à la France : nous avons enlevé du sel, nous avons intégré des ingrédients français (cantal, sucrine...) en ajoutant des goûts qu'aimaient les Français mais sans dénaturer la cuisine. Et pour proposer des produits de qualité qui restent abordables, nous devions absolument présenter une carte réduite.

Comment espérez-vous vous démarquer des concurrents, comme KFC, déjà implantés sur le territoire depuis de nombreuses années ?

Lorsque nous sommes arrivés en France, nous avions trois exigences pour l'enseigne. Tout d'abord, nous voulions offrir la meilleure qualité de produit par rapport à nos concurrents. Nous travaillons donc uniquement avec du poulet frais, de bonne qualité. Ne pas travailler avec du surgelé est une vraie rupture avec ce que font les autres acteurs du secteur. Nous avons deux spécialités qui nous différencient dans notre cuisine : le sandwich qui est vraiment un bestseller et nous sommes aussi les seuls à proposer des pièces de poulet entières sur os.

Ensuite, nous souhaitions nous inscrire dans la filière française. C'est pourquoi la plupart de nos approvisionnements sont d'origine française : le poulet vient de Bretagne, il est nourri avec des céréales françaises, le bun vient de Paris, nous utilisons du cantal AOP... Pour des problèmes de saisonnalité, nous sommes, pour le moment, contraints de nous approvisionner en Europe pour certains produits, notamment pour les légumes. Enfin, nous avions à coeur de mesurer notre impact environnemental et à respecter au maximum le bien-être animal, en se positionnant dès le début comme les mieux-disants du marché en terme de densité et, plus généralement, de respect de la vie animale. D'un point de vue écologique, mis à part la proximité de l'approvisionnement déjà évoquée, nous avons veillé à utiliser du matériel peu consommateur d'énergie.

Après près d'un an, Popeyes compte déjà 6 restaurants dans l'Hexagone. Quelles sont les ambitions de Popeyes en France ?

Les ambitions de notre marque sont toujours les mêmes : nous devons ouvrir en moyenne 25 restaurants par an sur 10 ans (soit 250 d'ici 2033). Ce plan de développement est très ambitieux mais nous avons déjà ouvert 9 restaurants (dont 3 dark kitchens) et avons sécurisé plus de 35 ouvertures. D'ici la fin de l'année, nous devrions avoir 12 établissements (deux nouveaux restaurants à Troyes et à Grenoble et une dark kitchen à Lyon). Nous sommes encore en rythme d'apprentissage de la marque et nous voulons absolument garder la maîtrise de nos opérations. L'année prochaine, nous essaierons d'en ouvrir entre 15 et 20 (Toulouse, Marseille, Montpellier, Lille, Strasbourg...) et à partir de 2025, nous espérons augmenter ce rythme.

Qu'est-ce qui vous séduit dans ce concept de dark kitchen ?

En réalité, ce concept n'est pas vraiment séduisant. En revanche, il permet d'accélérer la pénétration sur une zone. C'est plutôt un modèle transitoire pour accompagner, dans un premier temps, les restaurants saturés implantés dans les grandes villes. C'est d'ailleurs le cas à Lyon où la forte fréquentation du restaurant ne permet pas d'assurer le service de livraison. Dans un second temps, lorsque nous aurons davantage de restaurants implantés sur le territoire, nous fermerons petit à petit les dark kitchens, sauf en région parisienne. Sur les autres villes, nous ne sommes pas voués à garder les dark kitchens plus de 2 ans.

Pour attirer le plus grand nombre de consommateurs, proposez-vous des alternatives végétariennes ?

Nous avons une offre végétarienne qui se démarque un peu des autres : nous avons fait le choix de ne pas proposer de substituts de poulet comme nous pouvons l'observer ailleurs. Cela implique généralement de nombreuses transformations dans les recettes et donc nous optons plutôt pour un steak végétal à base d'haricots rouges. Nous travaillons avec RBI pour élargir cette gamme car il faut s'adapter aux nouvelles habitudes de consommation mais nous devons rester cohérents avec ce que nous proposons actuellement. Personnellement, je suis toujours en phase de réflexion sur ce sujet mais je pense que les végétariens n'ont plus, au bout d'un certain temps, l'envie de retrouver ce goût de viande. Je me trompe peut-être...Nous faisons des études pour voir vers quoi nous dirigerons nos recettes.

L'association L214 a annoncé vouloir manifester devant l'un de vos restaurants car, selon elle, "les poulets vendus par Popeyes sont élevés de manière abominable". Qu'avez-vous à leur répondre ?

Je n'ai plus rien à leur répondre car ils ont finalement annulé toutes leurs actions à la suite d'un accord que nous venons tout juste de trouver. Il y a une importante différence entre les annonces qu'ils font et la réalité : depuis février, nous avons des réunions avec L214 pour avancer sur ce sujet. Depuis le début, il savent que nous sommes les mieux-disants du marché sur les conditions de l'élevage. Ils nous mettaient une forte pression pour que nous signions l'European Chicken Commitment (ECC) et c'est justement ce que nous avons finalisé dans la journée d'hier. Avec L214, nous sommes donc de nouveau les meilleurs amis du monde (rire).

Quelle est la stratégie de communication de Popeyes en France ?

Nous n'avons pas les mêmes moyens que d'autres donc pour le moment, la télévision n'est pas notre priorité. De plus, notre volonté est de cibler des personnes qui ont entre 15 et 30 ans et ces derniers la regardent de moins en moins. En revanche, pour toucher ce type de consommateurs, nous avons plutôt choisi d'axer notre stratégie de communication vers les réseaux sociaux, avec un ton décalé, amusant. Nos publications sur TikTok par exemple peuvent générer jusqu'à plus d'un million de vues.

Êtes-vous satisfait des premiers résultats ? Pourriez-vous nous les détailler ?

C'est encourageant ! Nous avons mené des enquêtes d'opinion avec OpinionWay et les résultats sont très satisfaisants : 99 % des clients recommanderaient Popeyes à des amis, 98 % ont qualifié l'expérience d'excellente. De même, tous nos restaurants ont une note sur Google au-dessus de 4 étoiles. Le décor, le goût et les équipes de Popeyes plaisent beaucoup à nos clients. Tout cela se retrouve dans les chiffres : En moyenne, un restaurant de notre marque prépare 750 commandes par jour et accueille quotidiennement 1 400 clients. En termes de chiffre d'affaires, nous sommes au-dessus de ce que nous espérions dans nos trois établissements parisiens. Et en province, nous sommes au niveau attendu. Nous sommes contents de ces résultats-là !